
Entretien avec Jean-Marc Thystère Tchicaya, Ministre des Zones économiques spéciales et de la Diversification économique depuis septembre 2022, après avoir été ministre des Transports, de l’Aviation civile et de la Marine marchande (2021-2022) ainsi que ministre des Hydrocarbures (2015-2021).
Le Plan national de développement (PND) 2022-2026 met l’accent sur la diversification économique. Quel est votre plan d’action ?
Les orientations stratégiques du PND renvoient au choix privilégiant le développement « d’une économie forte, diversifiée, résiliente pour une croissance inclusive et un développement durable ».
Ce choix s’appuie sur les piliers stratégiques suivants : l’agriculture au sens large, avec l’idée de faire de ce secteur un levier de la transformation structurelle de l’économie, base d’une dynamique de croissance forte et durable ; l’industrie, pour élargir la base productive de l’économie et les opportunités de créations d’emplois ; les Zones Economiques Spéciales, en vue de renforcer l’industrialisation, attirer plus d’investisseurs privés, tant nationaux qu’étrangers, et asseoir une base d’exportation des produits locaux transformés ; le tourisme, en visant à exploiter de façon optimale le potentiel touristique national ; l’économie numérique, pour accroître la modernisation et la compétitivité de l’économie ; l’immobilier, dans la perspective d’assurer un logement décent à tous les congolais et de construire des infrastructures économiques et commerciales.
Il convient de noter que le PND 2022-2026 n’exclut pas les activités ne faisant pas partie des piliers stratégiques, notamment la santé, l’éducation, la défense, la sécurité et l’environnement. S’agissant du Département dont j’ai la charge, nous retenons que les Zones Economiques Spéciales doivent, en s’appuyant sur les autres piliers du PND, être le levier de la promotion irréversible d’un tissu industriel hors pétrole fort, créateur d’emplois et porteur de richesse.
L’opérationnalisation de cette vision appelle, au niveau gouvernemental, une stratégie efficace permettant une meilleure prise en compte des missions et responsabilités transversales.
La mise en place de cette stratégie passe par l’adoption d’un Plan stratégique national et d’une loi sur la Diversification Economique.
Au niveau des Zones Economiques Spéciales, la mise en œuvre des 3 programmes prioritaires retenus dans le Plan National de Développement 2022-2026 concerne :
– la gouvernance des zones économiques spéciales ;
– l’aménagement et la viabilisation des espaces des zones économiques spéciales ;
– le développement des activités industrielles, commerciales et touristiques dans les ZES.
Pour atteindre ces objectifs de performance, le Département s’est engagé, en sus de la prise en compte de ses responsabilités au niveau du pilotage de la diversification économique, dans une démarche de développement des zones économiques spéciales, laquelle exige :
– la recherche de développeurs nationaux ou internationaux pour l’aménagement et la viabilisation des ZES ;
– la mobilisation des investisseurs privés nationaux et internationaux crédibles porteurs des projets durables et de qualité ;
– l’obtention de la part de l’Etat d’un budget pro- diversification et des fonds devant permettre l’aménagement et la viabilisation des zones économiques spéciales ;
– la recherche des financements étrangers par le développement d’un partenariat avec des partenaires bilatéraux ou multilatéraux au développement en vue de financer des projets à fort impact ;
– l’implication, dans le cadre du contenu local, des PME/ PMI en joint-venture ou en sous-traitant des investisseurs internationaux qui viendraient s’installer dans les zones économiques spéciales ;
– l’élaboration et la mise en œuvre d’une politique de communication et de marketing efficace en vue de la promotion des zones économiques spéciales et de la diversification économique.
Le lancement des activités de la ZES d’Igné est-il effectif ? Où en est-on avec le développement des zones économiques spéciales de Pointe-Noire d’Oyo- Ollombo et de Ouesso ?
La viabilisation de la ZES d’Ignié a été enclenchée avec la réhabilitation du Parc Industriel et Commercial de Maloukou dont la concession a été confiée à la Société Macefield Congo Ventures SAS, filiale du groupe Crystal Ventures. En effet, aux termes de la convention de concession signée entre la République du Congo et le groupe Crystal Ventures, il a été confié à la filiale congolaise de ce Groupe, le développement, l’opérationnalisation et l’exploitation du Parc Industriel et Commercial de Maloukou, donnant ainsi à cette filiale, le statut de développeur au régime des ZES de ce Parc. A ce jour, les travaux de réhabilitation de ce Parc sont bien exécutés conformément au cahier de charges soumis au développeur. A cet effet, la période de mis en service de ce Parc est fixée au premier trimestre 2024 avec l’opérationnalisation de toutes les usines. Les potentiels investisseurs notamment ceux évoluant dans les secteurs de l’agro-industrie, la fabrication de matériaux de construction sont invités à prendre contact avec la société Macefield ou l’Agence de Planification, de Promotion et le Développement des ZES en vue de leur installation dans ce Parc. Outre le Parc Industriel et Commercial de Maloukou, sont attendus des investisseurs qui pourraient, à l’image des ZES de Pointe-Noire, d’Oyo-Ollombo et de Ouesso, assurer le développement de la ZES d’Igné. Notre principal défi dans le développement de cette zone réside dans l’assurance d’une source d’énergie stable, dédiée et de haute qualité.
Au niveau du développement de la ZES de Pointe-Noire, la République du Congo et le Groupe Arise IIP ont signé, en date du 4 octobre 2022, un accord cadre entériné par une convention de développement signé entre l’Agence de Planification, de Promotion et de Développement des ZES et la société Plateformes Industrielles du Congo Pointe-Noire, PICP en sigle, une Joint-Venture née de l’accord-cadre signé entre le Congo et le Groupe Arise IIP.
De plus, plusieurs autorisations destinées à la réalisation de ce projet ont été délivré à la société PICP afin de lui permettre de débuter ces travaux ; il s’agit notamment de l’obtention du certificat de conformité des études d’impacts environnementales et sociales, de l’obtention d’un permis forestier délivré par le Ministère de l’Economie Forestière destiné à assurer l’approvisionnement en bois de la ZES, des arrêtés au titre du Ministère de l’Energie et de l’Hydraulique pour la production d’Eau et de l’électricité.
Les travaux de la ZES de Pointe-Noire sont exécutés conformément au cahier de charges soumis au développeur. A ce jour, les travaux de construction des voiries, d’aménagement urbain et de génie civil dans l’enceinte de la ZES sont en voie d’achèvement. Les travaux de connexion au réseau électrique sont exécutés en ce qui concerne la première phase, notamment l’éclairage de toute la ZES. La deuxième phase de ces travaux portant sur la construction d’une ligne haute tension a démarré avec la signature d’un contrat de fourniture d’électricité entre la Centrale Electrique du Congo et la société PICP. Au regard de ce qui précède, la construction de la ZES de Pointe-Noire n’est pas un mythe comme certains le croiraient.
A l’image de la ZES de Pointe-Noire, le développement de la ZES d’Oyo-Ollombo a été confié au Groupe Arise IIP avec l’Accord-cadre signé le 4 octobre 2022 avec la République du Congo.
Le seul investisseur, installé jusqu’à ce jour dans cette zone économique, est la société COFCAO Farming, spécialisée pour la production de pâte de chocolat. La pose de la première pierre de construction de l’usine a eu lieu en octobre 2022. Située dans une des régions stratégiques du pays, la ZES de Ouesso a aussi été attribuée au Groupe Arise IIP pour son développement suite à un Accord-cadre signé entre ce Groupe et la République du Congo en vue de la viabilisation de cette ZES.
Plusieurs industriels, parmi lesquels SPECTECH, ont marqué leur intérêt à investir dans cette ZES. Des accords et contrats sont en cours de rédaction pour approbation et attribution définitives.
Quels sont les pays avec lesquels vous avez noué des partenariats dans le cadre du développement des ZES ?
La République du Congo, dans le cadre des activités liées aux zones économiques spéciales, a développé des partenariats avec la République Populaire de Chine, l’Île Maurice, le Gabon, le Togo, le Rwanda et le Benin. Aujourd’hui, des démarches ont été entreprises pour notre adhésion à l’Organisation Africaine des Zones Economiques (Africa Economic Zones Organisation, AEZO). Ceci nous permettra d’élargir la base de notre partenariat à d’autres pays Africains développant des Zones Economiques Spéciales.